Savoirs et propagandes : les chercheurs au service des diplomaties française et mexicaine dans les années trente

DOI : 10.48649/pshs.255

Abstract

Les chercheurs ont un rôle important dans les relations internationales. Ils deviennent des acteurs clés des échanges culturels, et c’est notamment le cas des relations franco-mexicaines dans l’avant Seconde Guerre mondiale. Il est en cela nécessaire de prendre en compte les rôles qu’ils ont dans les liens bilatéraux et de voir comment ils sont mobilisés par les différentes diplomaties pour favoriser les intérêts nationaux, et comment ils servent aussi les intérêts de l’autre pays. Les universitaires participent à la circulation des savoirs, et peuvent ainsi lutter contre les préjugés, comme ceux dont souffrait le Mexique postrévolutionnaire, et soutiennent la propagande mexicaine. De même, il est important d’analyser l’attraction que constitue le Mexique révolutionnaire pour certains universitaires de gauche, et ainsi de prendre en compte la porosité apparente entre la culture et la politique.

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Mots-clés

relations internationales, échanges culturels, instrumentalisation, circulation des savoirs

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Les chercheurs sont importants à plus d’un titre. Membres du corps universitaire, ils effectuent les fonctions de recherche spécialisée et d’enseignement au niveau supérieur. Grâce à leurs recherches, ils contribuent à la compréhension des phénomènes sociaux et naturels, à la modernisation technique et à la formation de nouveaux spécialistes, pour perpétuer les avancées scientifiques et techniques. Acteurs nécessaires au niveau national, ils participent aussi à l’intensification des échanges culturels internationaux. En effet, par leur action, les universitaires sont des agents primordiaux du soft power, c’est-à-dire de l’influence d’un pays sur d’autres, pour susciter la sympathie1. Leurs activités de recherche et d’enseignement alimentent les courants transnationaux de circulation et de diffusion des connaissances, des représentations, en plus des échanges humains, par leurs voyages et leurs séjours d’études, et matériels, à travers la vente de leurs livres2. Ainsi, de nombreux chercheurs tissent des liens entre les pays, pour apprendre à mieux connaître l’autre, et le cas franco-mexicain n’est pas une exception. L’universitaire, et notamment celui en sciences humaines, a un rôle clé dans les relations franco-mexicaines, et ce surtout durant les années 1930. Cette période est en effet charnière, puisque les échanges culturels franco-mexicains sont en transition, avec une intensification des contacts universitaires et le début de l’institutionnalisation des diplomaties culturelles.

La diplomatie culturelle est l’ensemble des actions et des efforts pour diffuser la culture nationale, que ce soient la langue, les traditions, les productions artistiques et scientifiques. Elle doit améliorer la représentation nationale et susciter la sympathie et l’admiration à l’extérieur. Cela apporte plusieurs bénéfices, comme un soutien politique et diplomatique, ou l’accroissement des exportations de produits typiques et culturels. La diffusion culturelle s’effectue à travers les livres, les conférences, les échanges universitaires, le cinéma, les instituts et les écoles créés à l’étranger. La diplomatie culturelle mobilise de nombreux acteurs officiels, les diplomates et instances gouvernementales, des créateurs et médiateurs culturels, les écrivains, artistes, professeurs et scientifiques, ainsi que des associations, comme l’Alliance française (créée en 1883)3. Les universités et les universitaires participent aussi à cette diffusion, dans le cadre d’une « diplomatie universitaire », comme l’a présenté Guillaume Tronchet4. La France est pionnière dans l’usage de la culture comme facteur d’influence, pour obtenir la sympathie des élites d’autres nations. Pendant l’entre-deux-guerres, la diplomatie culturelle française s’institutionnalise. En 1920, le Service des œuvres françaises à l’étranger (SOFE) est créé au sein du Quai d’Orsay. Cette entité soutient les institutions scolaires et universitaires françaises à l’étranger et organise les missions d’intellectuels et de conférenciers. Ainsi, le SOFE agit pour favoriser le « rayonnement culturel » français. Au Mexique, les diplomates et de nombreux acteurs transnationaux, comme les universitaires ou les artistes, les écoles religieuses ou les associations françaises, agissent de concert pour diffuser la culture française.

Plusieurs questions apparaissent à partir de ce constat : comment les diplomaties mobilisent-elles leurs universitaires ? Les rôles investis aux chercheurs varient-ils au Mexique et en France ? Quels intérêts servent les universitaires ? Ceux de leur nation ? de l’autre pays ? Ou bien leurs intérêts propres ? Pour répondre à ces interrogations, il est nécessaire de consulter plusieurs sources. Les archives diplomatiques permettent de prendre en compte les relations officielles entre les deux pays, les projets diplomatiques, les réalisations et les impressions qu’elles génèrent. Croiser les échanges des deux chancelleries permet aussi de connaître leurs conceptions du rôle des universitaires. D’autres sources sont primordiales pour l’étude de l’activité des universitaires, comme la presse quotidienne ou les publications des chercheurs. En cela, l’activité des universitaires en sciences humaines attire notre attention, pour analyser les tâches qui leurs sont octroyées, et les fonctions qu’ils doivent remplir.

Après avoir présenté le panorama des relations franco-mexicaines, il sera question de l’usage des chercheurs comme « ambassadeurs » de leur pays. Ensuite, l’analyse portera sur les actions des chercheurs pour mieux faire connaître l’autre pays, surtout pour le cas du Mexique en France. Enfin, l’étude mettra en lumière l’instrumentalisation politique de l’autre pays par les universitaires.

Les relations franco-mexicaines dans les années trente : une transition des diplomaties culturelles

Durant l’entre-deux-guerres, les relations entre la France et l’Amérique latine se caractérisent par « des logiques et mécanismes d’éloignement » selon Denis Rolland5. Le Mexique n’échappe pas à cette dynamique. La Révolution mexicaine (1910-1920) mit fin au porfiriat, dictature du francophile Porfirio Díaz (entre 1876-1880 puis 1884-1911), et permit l’avènement d’un nouveau régime, marqué par le nationalisme et plus attiré par la modernité économique étasunienne que le raffinement français. Les relations diplomatiques bilatérales s’enveniment à cause des violences révolutionnaires, et du non-remboursement des dettes du porfiriat. Dans les années trente, les Français au Mexique (environ 4 000) sont bien intégrés économiquement, et ils contrôlent certaines entreprises (grands magasins, usines textiles). Cette richesse leur permet de financer de nombreuses associations de bienfaisance ou culturelles, comme l’Alliance française.

Face à la situation internationale, les relations bilatérales sont tendues durant les années trente. Les deux pays s’opposent notamment au sujet de la guerre civile espagnole (1936-1939). Le Mexique soutient matériellement et diplomatiquement les républicains, alors que le Front populaire défend la non-intervention6. Ces divergences alimentent les tensions, les incompréhensions et les déceptions à Mexico, alors que sur le plan politique, les mesures sociales et agraires, ainsi que la nationalisation des chemins de fer et du pétrole rapprochent idéologiquement Lázaro Cárdenas du Front populaire. Sur le terrain économique, les échanges commerciaux n’augmentent guère. La France affronte une rude concurrence allemande et étasunienne, et peine à accroître ses exportations vers le pays latino-américain7. Plusieurs raisons expliquent ces difficultés : des erreurs commerciales françaises ; l’occasion manquée de concilier les intérêts nationaux des deux pays en n’achetant pas le pétrole mexicain récemment nationalisé en 1938 et boycotté par les Anglo-Saxons8.

Néanmoins, la situation est plus favorable sur le terrain culturel. Pourtant, la conjoncture est sombre à cause des mesures anticléricales des révolutionnaires qui obligent les écoles religieuses françaises à réduire leurs activités, voire à fermer9. De même, l’anglais est préféré au français, à cause de l’attraction générée par les États-Unis10. Malgré cela, plusieurs évolutions dynamisent les relations culturelles franco-mexicaines. Il y a d’abord une diversification des échanges, plutôt favorable au Mexique, car le pays latino-américain accroit sa présence artistique et cinématographique en France. De plus, les contacts s’intensifient, car des conférenciers et les chercheurs français voyagent plus fréquemment au Mexique. De même, l’État français soutient financièrement les échanges, en offrant deux bourses annuelles à des Mexicains à partir de 1937 ou en couvrant les frais d’universitaires se rendant dans le pays latino-américain. Enfin, les relations s’institutionnalisent grâce à la création d’organismes, comme l’École française de Mexico (EFM) inaugurée en 1930 et qui propose des bourses d’une année pour les doctorants, ou le Comité d’échanges universitaires Franco-Mexicain (CEUFM) qui permet l’envoi de conférenciers au Mexique11.

Dans ce contexte, les universitaires jouent un rôle primordial dans le resserrement des liens culturels franco-mexicains. Parmi les 39 conférenciers français qui vont au Mexique entre 1934 et 1939, dix sont spécialisés en médecine, huit proviennent des lettres et sciences humaines, cinq sont ethnologues ou anthropologues. Un peu plus de la moitié reçoivent un soutien financier public. De leur côté, seul quatre des dix-huit conférenciers mexicains qui se rendent en France à la même époque sont universitaires (trois juristes et un historien)12. L’importance des universitaires provenant des sciences humaines et sociales confirme leur rôle clé dans les échanges culturels et universitaires. Parmi les boursiers de l’EFM, quatre sont anthropologues, trois sont ethnologues, un est historien et un est géographe. De leur côté, parmi les 32 étudiants mexicains identifiés, seuls cinq suivent un cursus de sciences humaines et sociales, contre huit médecins, cinq militaires ou trois inscrits en sciences13.

Les universitaires dynamisent les échanges culturels bilatéraux en transition, surtout dans le domaine des sciences humaines et sociales. Maintenant il est nécessaire d’analyser plus attentivement les actions de ces universitaires, et de voir surtout comment ils sont mobilisés par les diplomaties françaises et mexicaines.

Des chercheurs comme « ambassadeurs » : une mobilisation diplomatique de l’universitaire

Les universitaires jouent un rôle important dans les échanges culturels entre le Mexique et la France. En effet, ils reçoivent plusieurs missions de chaque gouvernement. Dans l’autre pays, ils revêtent une fonction importante, celle de représentants de la culture et de la science de leur nation. Comme le distingue Christophe Charle, deux profils d’universitaires envoyés à l’étranger se caractérisent : celui du « spécialiste » dans son domaine, ou celui de l’« ambassadeur », qui présente sa culture ou son pays à travers des conférences destinées à un public plus large14. Par leurs actions, plusieurs universitaires français ont ce rôle d’« ambassadeur » au Mexique, et ils contribuent ainsi au rayonnement national.

Dans l’autre pays, les universitaires réalisent de nombreuses activités. Certaines sont liées à leur spécialisation, puisque plusieurs scientifiques poursuivent leurs recherches sur place. Le Mexique est un parfait laboratoire pour les analyses ethnologiques, anthropologiques ou médicales. Par exemple, Paul Rivet s’intéresse au peuplement de l’Amérique15. Il est directeur du Musée d’ethnographie du Trocadéro, puis Musée de l’Homme, ainsi que de la Société des Américanistes. Il réalise plusieurs séjours au Mexique à la fin des années vingt et durant les années trente. D’autres spécialistes se rendent dans le pays latino-américain pour leurs études sur l’anatomie ou les maladies, comme le physiologiste Henri Laugier, l’anatomiste André Latarjet, ou bien le prix Nobel de médecine Charles Nicolle. Cela démontre l’intérêt et l’attraction que suscite le Mexique, puisque de nombreux spécialistes y voient un moyen de compléter leurs recherches.

De leur côté, les universitaires mexicains se rendent en France pour poursuivre leurs études. Pour certains, l’acquisition des connaissances et techniques françaises doit aider à moderniser le Mexique. La médecine, la littérature et le droit sont les secteurs qui attirent les étudiants mexicains. C’est le cas d’Alfonso García Robles, qui étudie le droit international à Paris au milieu des années trente. Sa formation lui permet de suivre une grande carrière diplomatique, laquelle se parachève par l’obtention du prix Nobel de la paix en 1982, pour sa lutte contre la prolifération d’armes nucléaires en Amérique latine à la fin des années soixante16. En cela, le statut des universitaires français et mexicains prouve l’asymétrie des relations, puisque les premiers étudient le Mexique, alors que les seconds se spécialisent dans leur branche grâce à l’université française.

Les universitaires ont donc un rôle d’étude et d’analyse de l’autre. Cependant, une autre activité prédomine, celle de la diffusion de connaissance, notamment à travers la conférence. De nombreux universitaires français profitent de leur séjour au Mexique pour réaliser des conférences. Les universitaires jouent un rôle d’« ambassadeur » ou de « spécialiste » selon la distinction de Christophe Charle mentionnée antérieurement. Lors de ces conférences, les « spécialistes » exposent leurs recherches et démontrent ainsi l’intérêt que représente le Mexique pour la science. Ils informent de leurs découvertes sur le terrain et de leurs travaux réalisés. Ainsi, ils font connaître les résultats des études scientifiques françaises. En cela, les conférences spécialisées ont de nombreuses vertus : elles légitiment leur activité au Mexique ; elles démontrent que la recherche française est efficace et qu’elle participe aux avancées scientifiques ; cela permet aussi aux spécialistes mexicains d’en apprendre plus sur la production scientifique française, de leur apporter de nouveaux concepts ou des pistes de recherches ; enfin cela peut convaincre des étudiants mexicains à s’inscrire dans les universités françaises. De même, elles favorisent la vente de la production scientifique, dont les livres ou les revues.

Les diplomates français soulignent l’importance du conférencier dans la diplomatie culturelle17. Certains, dans cette conception stratégique, insistent pour limiter le nombre de conférenciers afin d’en privilégier la qualité. Cela démontre à quel point les universitaires deviennent des outils d’influence, des « ambassadeurs », que ce soit politiquement ou culturellement. Leur rareté et leur qualité renforcent le prestige culturel de la nation qu’ils représentent ; ils deviennent donc des représentants stratégiques pour le rayonnement de la France.

L’universitaire est ainsi un élément important de la propagande nationale. Il contribue au prestige du pays, en renforçant la francophilie ou la mexicanophilie. Il crée et consolide les sympathies des universitaires de l’autre pays, que ce soit par les rapports personnels ou en renforçant l’admiration. L’intérêt et l’objectif des diplomates est de mobiliser ces sympathies pour défendre la cause et les intérêts nationaux. De même, durant leurs conférences, les universitaires présentent la situation de leur pays, et justifient les décisions gouvernementales, ou combattent les mensonges qui circulent. Quelques Français s’adonnent à cette pratique, dont certains universitaires de gauche, comme Paul Rivet ou le zoologiste Marcel Prenant, présents au Mexique lors de la période du Front populaire entre 1936 et 1938. Cependant, ce sont surtout les Mexicains qui profitent de leur statut d’universitaires pour défendre leur patrie. Cela se voit par la proportion de Mexicains spécialistes en droit qui font des conférences. Par exemple, lorsque Garcia Robles justifie la décision mexicaine d’expropriation des compagnies pétrolières18, il ne le fait pas seulement comme un Mexicain qui défendrait la cause nationale, mais surtout comme spécialiste du droit international dont les compétences ont été validées par la Sorbonne.

José Muro Méndez ou Francisco Frola, spécialistes en droit, participent aussi à l’effort de propagande en faveur de la réforme agraire entreprise par Cárdenas, lors de conférences ou dans la presse19. L’intitulé de « professeur de l’université nationale du Mexique » accolé à leurs noms donne une plus grande validité à leurs propos, qui ne proviennent pas d’un militant, mais d’un universitaire. Cependant, il semblerait que la voix du spécialiste national ait ses limites, comme le prouve l’étude du professeur Paul Boracrès, Le Pétrole mexicain, une propriété volée ? publiée en anglais, en français et en espagnol. L’ouvrage, supposé être d’un économiste roumain, est pourtant l’œuvre de García Robles, en accord avec le sous-secrétaire de l’économie Eduardo Villaseñor et le ministre mexicain à Paris Narciso Bassols20. L’usage d’un pseudonyme démontre la nécessité de se cacher derrière le masque d’un auteur étranger, pour défendre efficacement la thèse gouvernementale de la nationalisation du pétrole.

De même, la venue d’universitaires favorise la mise en place de rituels et cérémonies qui renforcent le prestige national. Il s’agit surtout de la « mondanité » de la conférence, qui devient un évènement où il faut être, comme l’a par exemple noté François Chaubet21. Plus qu’une activité d’intérêt culturel, la conférence est un marqueur social d’appartenance à l’élite mexicaine, car elle est généralement donnée en français. C’est aussi le cas lors des banquets, qui rassemblent au Mexique l’universitaire, les diplomates, des Français et des francophiles. L’évènement donne lieu à des discours qui célèbrent la grandeur culturelle de la France, qui remercient les sympathies mexicaines, et qui démontrent l’importance de la recherche française. Le goût de la « vie à la française » y est aussi mis en avant, puisque les discussions s’accompagnent de mets français et de coupes de champagne. Les représentants pharmaceutiques français au Mexique ont par exemple organisé un banquet en l’honneur du docteur Pierre Abrami, auquel assistent plus de quarante médecins mexicains. Cela démontre la portée non seulement culturelle ou sociale, dont les buts seraient de rassembler des Mexicains et leurs confrères français, mais aussi commerciale, en célébrant la production pharmaceutique française, adoubée par un illustre médecin, sans compter d’autres spécialités servies comme les spiritueux ou les vins22.

La vertu propagandiste, pourtant rejetée par les universitaires français, est parfois ouvertement admise, comme par exemple lors du banquet en l’honneur d’André Siegfried, premier conférencier du CEUFM. Si à son arrivée, le sociologue « se défendit de vouloir venir [au Mexique] faire œuvre de propagande23 », quelques jours après, Paul Waltz, le directeur de l’Alliance française de Mexico, lui rétorqua que « Vous nous disiez, […] que vous n’aimiez pas la propagande. Et cependant, maître, quelle belle propagande vous faites, sans le vouloir, à notre France !24 ». Comme on le voit, les universitaires sont investis d’un rôle important comme « ambassadeurs », puisqu’ils ont comme mission de défendre le prestige et l’influence de leur pays. Cette action ne se limite pas à l’aspect culturel, puisqu’il peut avoir des répercussions politiques voire économiques. Il est intéressant de noter que les universitaires mexicains assument plus clairement ce rôle de propagandiste, comme Garcia Robles ou Muro Méndez, contrairement aux Français.

La participation de l’universitaire se poursuit aussi dans le processus de décision, ou dans l’initiative en tant que telle. Paul Rivet en est probablement l’incarnation. Si Georges Dumas a été fondamental dans les relations culturelles avec le Brésil et Ernest Martinenche avec l’Argentine, Rivet l’est très certainement pour celles avec le Mexique25. Il est à l’initiative de deux institutions importantes, l’École française du Mexique à la fin des années vingt, et l’Institut français d’Amérique latine dans les années quarante. Il incarne le rôle prépondérant de l’universitaire comme créateur d’institutions à l’étranger. En 1929, lors d’un voyage au Mexique, il propose au ministre français Jean Périer de créer un institut au Mexique sur le modèle de l’école d’Athènes ou de Rome, qui permettrait l’envoi d’un étudiant au Mexique pour y analyser la population et la culture indigène26. C’est un succès puisque qu’entre 1931 et 1940, une bourse annuelle est octroyée à un étudiant français pour faire des études de terrain. Ce projet, avec les répercussions qu’il a pour l’étude du Mexique, démontre que l’universitaire passe aussi à l’action et met en œuvre des éléments structurant les relations culturelles, avec le concours financier gouvernemental. Il développe ainsi la diplomatie universitaire et culturelle de la France.

Rivet participe aussi aux discussions bilatérales sur les échanges culturels. La création du CEUFM, qui permet l’envoi d’un conférencier français au Mexique, facilite les conversations entre diplomates mexicains, le Quai d’Orsay et les universitaires. Lors des réunions, Rivet donne son avis sur les mesures à mener27. Rivet remplit donc à la fois le rôle de spécialiste, de consultant et celui d’initiateur pour les échanges culturels franco-mexicains. Cela est possible grâce à son statut d’universitaire, en plus de celui de directeur du Musée de l’Homme, ce qui lui donne un poids important dans les relations entre la France et l’Amérique latine.

D’autres universitaires participent aussi aux négociations. Certains universitaires mexicains ont un rôle institutionnel pour renforcer les liens bilatéraux, comme par exemple le recteur Luis Chico Goerne, nommé ministre conseiller auprès de la Légation mexicaine à Paris en 1938. Pour améliorer les relations culturelles entre le Mexique et la France, il propose une feuille de route au Quai d’Orsay, qui contient de nombreuses mesures, allant d’un cycle de conférences à la création d’un Institut culturel franco-mexicain. Son action cependant n’a pas les effets escomptés. Ses initiatives menées sans avoir consulté le Secrétariat des relations extérieurs sont critiquées et provoquent son rappel début 193928. La participation institutionnelle d’universitaires français s’intéressant au Mexique est plus limitée. Le cas du physiologiste Henri Laugier est une exception. En 1933, il va au Mexique pour réaliser des études. Il crée aussi une antenne de l’Union rationaliste à Mexico, et se lie d’amitié avec certains Mexicains, comme le recteur de l’Université nationale du Mexique, Fernando Ocaranza. C’est d’ailleurs ce lien qui favorise la création du CEUFM. En 1936, Laugier devait retourner au Mexique pour compléter ses recherches. Il doit pourtant annuler sa mission, étant nommé directeur de Cabinet d’Yvon Delbos, ministre des Affaires étrangères du premier gouvernement de Léon Blum. Sa nouvelle fonction permet de nouer des relations cordiales entre la légation du Mexique et le Quai d’Orsay29.

L’universitaire est donc un acteur important pour les diplomaties. Ainsi, il est mobilisé comme « ambassadeur » de la culture nationale quand il n’a pas un rôle direct dans les processus de décision. Il a aussi une fonction d’analyste et de diffuseur dans l’autre pays, comme le montre le cas des conférenciers ou des chercheurs réalisant des études de terrain. Il est maintenant nécessaire de considérer l’autre versant de ce rôle de médiateur, lors du retour des chercheurs, notamment en France.

Mieux faire connaître l’Autre : des universitaires au service du Mexique

L’universitaire a plusieurs rôles dont celui de générer des connaissances, des analyses et de transmettre ce savoir. Par leurs voyages, les chercheurs français connaissent mieux le Mexique, sa culture et sa société. Ainsi, le chercheur prend un rôle de médiateur, puisqu’il diffuse ses analyses sur la société et la culture mexicaine à un public qui ignore la réalité du pays latino-américain. Cette médiation varie entre la divulgation, qui atteint un large public, et la transmission scientifique et spécialisée, pour un groupe de connaisseurs ou de personnes intéressées par le sujet. Les formats utilisés varient entre la conférence, la publication ou l’exposition.

Les universitaires, et surtout ceux provenant des sciences sociales et humaines, utilisent ces différents moyens pour présenter le Mexique au public français. Par exemple, entre 1934 et 1939, parmi les 59 conférences sur le Mexique présentées par des Français30, 34 sont réalisées par des universitaires, dont 26 par des spécialistes des sciences humaines. À lui seul, Jacques Soustelle effectue onze présentations, alors que Rivet en fait huit31. Soustelle est ethnologue. Proche de Rivet, il étudie la population indigène mexicaine en 1934 puis en 1939. Ces deux chercheurs jouent un rôle fondamental dans la présentation du Mexique au public français. Les thèmes des conférences sont assez variés, mais les sujets historiques sont prédominants pour les Français (25 sur 59 conférences), suivis de quinze liés à la politique. Cela confirme l’intérêt du public pour les populations indigènes mexicaines, que ce soit dans un rapport historique plus ancien, ou en lien avec les recherches des universitaires. De même, les universitaires ne limitent pas leurs exposés aux cercles académiques. En effet, des conférences sont organisées dans les musées, des cafés ou dans des espaces d’organisations politiques, comme au « Centre culturel prolétarien »32. Cela démontre l’envie de faire connaître le Mexique au grand public. Le plus souvent, le « Mexique ancien » et les populations indigènes y sont présentés.

Les écrits des universitaires sur le Mexique se dirigent quant à eux surtout vers le milieu académique. Beaucoup sont publiés dans des revues scientifiques, comme le Journal de la Société des américanistes. Parmi les étudiants de l’EFM, Roland Ricard et Soustelle publient leurs thèses dans les années trente, le premier sur la christianisation du Mexique lors de la conquête espagnole, le second sur une famille ethnique et linguistique, les Otomi-Pame33. Cependant, leur spécificité n’est pas adaptée à un public élargi. Soustelle essaie néanmoins d’atteindre un lectorat plus large avec Mexique terre indienne 34, dans lequel il retrace son itinéraire au Mexique, et présente ainsi son voyage et ses contacts avec les indigènes. On y trouve aussi des réflexions sur la vie mexicaine, ce qui rapproche le livre du style du récit de voyage. Sa réception est d’autant meilleure à Mexico que le livre est vu comme un parfait moyen de propagande et un support idéal pour renforcer les relations bilatérales35. Rivet, qui signe la préface, insiste sur l’un des bienfaits de ce livre, celui de donner une image plus claire du Mexique en France. Comme il l’écrit :

« Voici enfin un livre sincère sur le Mexique. J. Soustelle aime ce pays et ses habitants, ou plutôt il a appris à les aimer en les comprenant […]. Ce livre n’est pas seulement un livre sincère, c’est aussi un livre vrai. Peu de pays, sauf la Russie, ont été plus calomniés que le Mexique. La responsabilité en revient en grande partie aux touristes pressés, qui n’ont noté que l’apparence des choses, les visions entr’aperçues à travers les glaces d’un compartiment ou d’une automobile, voire du haut d’un avion, et qui n’ont pu ni su deviner l’immense effort d’un peuple pour devenir une nation36. »

Rivet insiste sur certaines tâches de l’universitaire. Il présente l’importance du travail du chercheur, celui de comprendre l’Autre, de combattre les préjugés, pour avoir une vision véridique. Il est opposé au touriste, puisque Soustelle, ou l’universitaire, doit briser les « glaces » pour être ainsi en contact direct avec le pays, les habitants, et prendre son temps pour les comprendre. En cela, le livre de Soustelle n’est pas seulement un récit de voyage, mais aussi une analyse « sincère », « vraie », qui en termine avec les « calomnies » et les « préjugés ». Il offre ainsi une meilleure image du Mexique, qui se rapproche de la réalité et qui permet aux lecteurs d’en savoir plus sur ce pays.

Les universitaires présentent aussi le Mexique lors d’expositions. Dirigé par Rivet, le Musée d’ethnographie, puis Musée de l’Homme, est un espace clé pour faire connaître le Mexique à un large public à travers des conférences. La galerie Amérique du musée abrite aussi l’exposition « Deux ans parmi les Indiens », à partir de mars 1935, qui présente les résultats des recherches de Soustelle ainsi que de nombreux objets archéologiques et artisanaux mexicains rapportés par l’ethnologue37.

Ces divulgations diffusent de nouvelles connaissances sur le Mexique, et transmettent des représentations différentes sur ce pays plutôt méconnu. Grâce aux conférences, aux expositions ou aux publications, les universitaires combattent les préjugés sur le Mexique. Ils informent sur des aspects culturels clés de la société mexicaine, ou expliquent les préoccupations et les attentes des Mexicains. Ils offrent un nouvel imaginaire au public, dans lequel le Mexique n’apparaît plus seulement comme un pays révolutionnaire et violent, mais comme une nation d’une richesse culturelle et historique.

Pour ces raisons, l’activité des universitaires en sciences humaines est très bien estimée par les diplomates mexicains. En effet, elle représente à leurs yeux plusieurs avantages. L’exposition du Musée d’ethnographie est appréciée par Marte R. Gómez, ministre plénipotentiaire mexicain à Paris entre 1935 et 1936. Ce dernier y voit un exemple d’actions de diplomatie culturelle que le Mexique doit mener, mais que les moyens financiers empêchent de réaliser38. En cela, les expositions permettent une diffusion culturelle du Mexique, à moindre frais pour ce pays. Les conférences reçoivent aussi le soutien des diplomates mexicains, puisqu’ils en président certaines39.

La présentation du Mexique par des universitaires offre des avantages majeurs pour la diplomatie mexicaine. Cela permet d’avoir une diffusion différente et positive du Mexique, comme cela a été mentionné. Le point de vue d’un scientifique renforce aussi la crédibilité et la validité de ses propos, à cause de son objectivité associée. Ricard ou Soustelle insistent notamment sur l’inclusion des populations indigènes dans la société mexicaine, et démontrent ainsi la modernisation du pays40. Cela met en valeur les efforts d’éducation du gouvernement de Cárdenas et permet de détourner les critiques de la presse catholique sur les mesures anticléricales dans l’éducation.

Les universitaires français contribuent de manière bénéfique à l’influence mexicaine, puisqu’ils sont considérés comme des acteurs désintéressés, « sincères » comme dirait Rivet, c’est-à-dire qu’ils ne semblent pas prendre parti, et qu’ils ne se laissent pas influencer par les préjugés ou par leur opinion. C’est probablement ce qu’ont pensé Garcia Robles, Villaseñor et de Bassols quand ils ont décidé de publier un livre sur la nationalisation du pétrole mexicain, sous le pseudonyme d’un prétendu spécialiste roumain, mentionné antérieurement. Le propos de l’universitaire non mexicain prend ainsi une valeur légitimatrice. L’œuvre éducative du gouvernement de Cárdenas présentée par Soustelle ou Ricard est aussi légitimée, car ce sont des scientifiques qui l’analysent et la valident. En effet, ce ne sont pas des Mexicains qui défendent la politique de leur patrie, mais des scientifiques étrangers qui ont étudié la société d’un autre pays, et qui présentent leurs constats. Cela contribue ainsi à améliorer l’image du Mexique au sein du public français.

Le Mexique est alors présenté plus amplement et régulièrement aux Français grâce à l’action des universitaires. Les publications, les conférences ou les expositions sont des moyens importants pour mieux faire connaître le pays latino-américain et soutiennent ainsi la diplomatie culturelle mexicaine. Cependant, la connaissance du Mexique ne se fait pas seulement à travers la culture, et certains universitaires français utilisent aussi la politique mexicaine à des fins idéologiques.

L’instrumentalisation d’un pays par des individus engagés

Dans le contexte de divisions des années trente dans lequel se dessinent trois grands blocs au niveau idéologique (libéralisme démocratique, communisme et fascisme), le Mexique révolutionnaire n’échappe pas à la polarisation. Les universitaires engagés sont certainement intrigués par l’image sulfureuse projetée par le pays latino-américain, et ne conservent pas forcément la totale « sincérité » mise en exergue par Rivet envers leur objet d’études. Parmi les chercheurs, plusieurs sont connus pour leur orientation de gauche. Rivet par exemple est proche de la Section française de l’Internationale ouvrière (SFIO), ou parti socialiste, et est l’un des trois intellectuels fondateurs du Comité de vigilance des intellectuels antifascistes (CVIA)41. Laugier est aussi de gauche, en témoigne sa participation au gouvernement du Front Populaire comme directeur de cabinet de Delbos. Soustelle milite quant à lui dans une organisation de gauche radicale dans les années trente42.

Il n’est pas surprenant d’observer l’intérêt d’universitaires antifascistes ou de gauche envers un pays révolutionnaire, appliquant des mesures sociales et politiques radicales. Ces chercheurs y ont probablement trouvé à la fois un champ d’analyse riche pour leurs études personnelles, ainsi qu’un terrain d’expériences politiques. Certains chercheurs présentent le Mexique dans des groupes de gauche. Cette volonté de divulgation constitue un moyen d’éducation populaire, présentant culturellement le Mexique à un public plus large, et plus seulement aux élites culturelles. Dans ce but, les responsables du Musée de l’Homme (Rivet, Soustelle et Georges-Henri Rivière) ont créé l’Association populaire des amis des musées (APAM)43. Cette initiative devait donner accès aux musées et à la culture en général à un public plus large. Par exemple, Soustelle a lié l’APAM au grand mouvement social suscité par le Front populaire en mai-juin 193644. L’APAM organise plusieurs conférences et évènements sur le Mexique, comme par exemple deux soirées mexicaines en février 193945. La première soirée se divise en plusieurs temps, et sous la présidence de José Núñez y Domínguez, historien mexicain, avec les conférences de Soustelle et de Georges Fournial, secrétaire de l’Internationale des travailleurs de l’éducation46. Le court-métrage de Serguei Eisenstein Kermesses Funèbres et un documentaire sur l’art Maya sont aussi projetés.

Plusieurs conférences ont lieu dans des espaces liés aux mouvements de gauche, comme une des conférences de Soustelle, sur les « Mayas », dans le Centre culturel prolétarien, proche des mouvements d’extrême-gauche et anarchistes. C’est aussi le cas d’évènements réalisés par des organisations découlant du Front populaire, comme « Mai 36 », proche de la SFIO, confirmant la porosité entre le culturel et le politique47. De même, le Club hispaniste, rassemblant des universitaires s’intéressant à l’Espagne et l’Amérique latine, organise aussi des conférences favorables à la politique de Cárdenas, comme celle de Muro Mendez48. La présentation du Mexique est ainsi ancrée dans le politique, et ce à travers l’action des universitaires. Ce mouvement n’est pas seulement effectué par les chercheurs spécialisés en sciences humaines. Par exemple, la conférence du chef syndical mexicain Vicente Lombardo Toledano est présidée par le physicien Paul Langevin, proche du PCF et réalisée à la Maison de la chimie, signe des liens étroits entre le politique et le scientifique49.

Les universitaires deviennent ainsi des agents favorables au Mexique, en présentant ce pays à des auditeurs de gauche. Cela a plusieurs effets comme de mieux faire connaître ce pays et de susciter de nombreuses sympathies. Les groupes de gauche peuvent ensuite défendre la politique du Mexique. Le gouvernement cardéniste obtient ainsi le soutien de groupes politiques français qui ont été sensibilisés aux préoccupations populaires et aux solutions prises pour le développement du pays50. Cependant, ces activités confirment aussi les préjugés du Mexique révolutionnaire et de gauche.

Néanmoins, les universitaires de gauche ne sont pas les seuls à organiser des conférences sur le Mexique. En effet, les groupes catholiques dénoncent par ce biais les mesures anticléricales du gouvernement mexicain. Cependant, ce sont souvent des religieux ou des professeurs d’écoles catholiques et non des chercheurs qui exposent51. Il est plus difficile de localiser des universitaires conservateurs s’intéressant ou ayant connu le Mexique. Trois chercheurs semblent s’en rapprocher idéologiquement. Ricard, premier titulaire de la bourse de l’EFM, entre 1930 et 1931, paraît plutôt proche des catholiques par ses thématiques d’intérêts et ses contacts. En effet, il a analysé le processus de christianisation du Mexique lors de la conquête par les Espagnols52. En 1937, il crée un Comité d’études d’histoire mexicaine avec différentes personnalités du milieu catholique comme Jean Guiraud, éditorialiste de La Croix ou le philosophe catholique Jacques Maritain53. Le Comité ne semble pas avoir eu d’activité ni de résonnance et n’a pas constitué un milieu d’étude ou de dénonciation envers le Mexique, malgré les condamnations proférées par certains membres comme Guiraud dans ses articles54.

Le sociologue André Siegfried, premier envoyé par le CEUFM, critique quant à lui la politique du Mexique. Selon le reporter d’Havas à Mexico, il a été perçu comme « un affreux réactionnaire » par « les gens du gouvernement et les intellectuels » mexicains55. Son expérience du Mexique est assez agitée, puisqu’il y séjourne en plein conflit universitaire56. Il en garde des souvenirs assez mitigés. Au sujet du Mexique il estime que c’est un « pays où un parti national révolutionnaire est en train d’imiter la politique des Soviets »57. Louis Germain-Martin, historien économiste, vitupère quant à lui la politique mexicaine. Il réalisa des conférences au Mexique en 1927 et étudia la situation économique mexicaine58. Ministre des Finances du parti radical dans les années trente, proche ensuite de l’organisation du patronat59, il attaque en 1938 les mesures économiques mexicaines. Selon lui, la politique cardéniste est influencée par le marxisme, et est par conséquent un facteur de misère60. Les trois universitaires présentés ont ainsi des approches différentes vis-à-vis du Mexique : Ricard se cantonne à son sujet de recherche, alors que Germain-Martin utilise le Mexique pour dénoncer l’intervention étatique dans l’économie et le communisme par extension.

Cependant, l’appropriation du Mexique comme argument politique n’est pas le seul fait de l’historien Germain-Martin. La gauche, on l’a vu, s’intéresse amplement au Mexique. Les mêmes nuances se retrouvent, entre chercheurs qui se limitent à l’analyse et ceux qui au contraire instrumentalisent la politique mexicaine pour légitimer leur engagement. Soustelle, par exemple, le démontre. La revue hebdomadaire Regards, favorable à l’union des gauches, publie deux séries de trois articles de l’ethnographe. La première, dans le cadre de divulgation académique, s’intitule « Les derniers descendants des Mayas61 ». Elle est publiée en septembre 1935, et retrace son voyage et ses recherches dans le sud du Mexique, auprès des Mayas de la Forêt Lacandone. Il y présente ce qu’il a pu y observer ainsi que la culture maya et ses persistances.

Le second triptyque est quant à lui beaucoup plus politique. Il s’intitule « Inquiétudes mexicaines » et est publié en janvier et février 193662. À ce moment-là, la France est en pleine campagne électorale pour les législatives de 1936 – celles qui débouchent sur la victoire du Front populaire –, et les articles s’insèrent parfaitement dans ce contexte. Présentant la situation politique du Mexique, le premier numéro est le moins engagé, malgré les critiques contre l’Église. Le second article est publié le 6 février, et s’intitule « Comment le Front Populaire mexicain a terrassé le fascisme ». Le numéro rappelle les évènements du 6 février 1934, lorsque la manifestation contre le régime parlementaire, organisée par les ligues d’extrême-droite, a failli déboucher sur la prise d’assaut de la Chambre des députés. L’acte fut perçu comme une tentative de coup d’État fasciste et a conduit la gauche à s’unir sous le Front populaire dans l’espoir de mettre fin à cette menace en France63. L’article de Soustelle laisse sous-entendre que le Front populaire au Mexique a réussi cette mission, puisqu’il a « terrassé » le fascisme, et ce avant la France, en mettant fin à divers groupes présumés fascistes, comme les « Chemises dorées », ou à la dictature de Plutarco Elias Calles64.

Le texte de Soustelle semble être une feuille de route à suivre pour réussir à vaincre le fascisme. Il présente l’action du syndicat de chauffeurs de taxis pour défendre les manifestants face à la charge de cavalerie des Chemises dorées lors de la célébration des vingt-cinq ans de la Révolution mexicaine. Soustelle met en avant la nécessité d’union et de cohésion pour affronter les menaces fascistes. Il conclut que « le danger n’a été que différé. Seul le Front populaire en se renforçant, en le faisant représenter au pouvoir, peut le conjurer définitivement »65. Ces derniers mots doivent susciter l’attente du lecteur et interpeller indirectement les électeurs antifascistes. L’article appelle donc à la mobilisation pour soutenir le Front Populaire français qui seul peut « conjurer » la menace fasciste. Le dernier article, « Le Front Populaire dans la lutte », est quant à lui plus nuancé, mais montre comment le « Front Unique » mexicain a réussi à impulser une politique favorable aux masses, et à soutenir les demandes sociales liées à la Révolution mexicaine de 1910. Les articles, dont le ton est engagé, sont donc l’œuvre d’un militant, plus que de l’universitaire.

Les articles « Inquiétudes mexicaines » servent donc à Soustelle à mobiliser ses lecteurs, pour que le Front populaire, français cette fois-ci, soit porté au pouvoir et puisse appliquer une politique antifasciste et favorable aux masses, comme au Mexique. On voit là une appropriation de la situation mexicaine comme un horizon favorable, celui d’un front populaire triomphant, où le fascisme est défait, et le programme social appliqué. Ainsi, le Mexique est instrumentalisé par Soustelle, pour encourager les électeurs de gauche à se mobiliser dans une période et un contexte électoral polarisés.

Conclusions

L’universitaire des sciences humaines a de nombreux usages extra-académiques. En effet, c’est un acteur fondamental des relations bilatérales franco-mexicaines des années trente. Le chercheur est investi de plusieurs missions, comme celui d’« ambassadeur ». En effet, dans l’autre pays, l’universitaire participe à divers évènements, comme des conférences, des banquets ou des fêtes qui favorisent l’influence de leur pays. Il y présente les réalisation scientifiques et culturelles nationales, informe des avancées politiques et renforce les sympathies. Ce rôle ne se limite pas qu’aux Français, et des universitaires mexicains sont très actifs en France pour faire connaître leur pays et défendre les mesures prises par Cárdenas. En effet, les universitaires mexicains réalisent une propagande plus active que leurs confrères français.

Cependant, les universitaires ont un autre rôle crucial. À leur retour, ils deviennent aussi des vecteurs favorables à l’autre pays. Lors de leur séjour au Mexique, les chercheurs en sciences humaines acquièrent de nombreux savoirs, que ce soit sur la culture ou sur la société mexicaine. Ils exposent leurs travaux à travers les conférences, les publications ou les expositions. Dans ce domaine, Soustelle et Rivet sont les plus actifs, même si d’autres universitaires présentent un Mexique différent des préjugés existants. Ce rôle d’intermédiaire ou de divulgateur est d’autant plus apprécié par les Mexicains puisque cela soutient l’effort d’une diplomatie culturelle affaiblie à cause d’un budget réduit.

Cependant, l’universitaire n’est pas seulement un instrument, sinon qu’il agit de lui-même pour défendre ses propres intérêts idéologiques. Les années trente sont en effet une période de forte mobilisation politique, et le Mexique, pays au gouvernement radical et parfois qualifié de « bolchévique », génère les fantasmes, les espoirs et les craintes. Le pays latino-américain devient ainsi un repoussoir politique, pour un anticommuniste comme Germain-Martin, ou un modèle mobilisateur, pour l’antifasciste Soustelle. La porosité entre les efforts politiques et culturels entrepris par certains universitaires démontre aussi l’aspect idéologique du sujet d’étude qu’est le Mexique, et l’importance de l’engagement de l’universitaire comme acteur politique. Le Mexique s’intègre parfaitement dans l’effort d’éducation populaire que cherchent à créer les différents acteurs du Musée de l’Homme dans le cadre de l’APAM.

L’universitaire est donc à la fois un outil à l’échelle des relations internationales, puisque les diplomaties y voient un agent propagateur des valeurs et de la culture nationale, et un acteur clé puisqu’il est un générateur de connaissances et de représentations de l’Autre, voire un créateur d’institutions, comme Rivet. L’universitaire permet ainsi d’intensifier les échanges bilatéraux, par ses actions, par ses contacts mais aussi par la présentation scientifique qu’il fait de l’objet d’étude qui l’intéresse. L’universitaire est donc un moteur essentiel des circulations transnationales, de connaissances, de représentations, qu’elles soient politiques ou bien culturelles.

1 NYE J. S., « Soft Power », Foreign Policy, n° 80, 1990, p. 167.

2 FRANK R., « Culture et relations internationales : les diplomaties culturelles », dans FRANK R. (coord.), Pour l'histoire des

3 CHAUBET F., MARTIN L., Histoire des Relations culturelles dans le Monde contemporain, Paris, Armand Colin, 2011, p. 84-85.

4 TRONCHET G., Savoirs en diplomatie : une histoire sociale et transnationale de la politique universitaire internationale de la France (années 1870

5 C’est l’objet de la seconde partie de son étude. ROLLAND D., La Crise du modèle français : Marianne et l'Amérique

6 OJEDA REVAH M., México y la guerra civil española, Madrid, Turner, 2004, p. 216-218 ; DUROSELLE J.-B., La Décadence, 1932-1939, Pa

7 AVELLA ALAMINOS I., De Oportunidades y retos. Los engranajes del Comercio Exterior de México 1920-1950. Thèse en histoire,

8 HÉGRON B., « La expropiación petrolera mexicana de 1938 y Francia: repercusiones, negociaciones y diplomacia pública mexicana », Es

9 FOULARD C., Les congrégations enseignantes françaises au Mexique (1840-1940), politiques religieuses, politiques de

10 CHAUBET F., La politique culturelle française et la diplomatique de la langue, Paris, L'Harmattan, 2006, p. 246-247.

11 HÉGRON B., Las relaciones entre Francia y México (1934-1939), Thèse de doctorat, Universidad Nacional Autónoma de México,

12 Les archives diplomatiques françaises et mexicaines et de la presse française et le Journal Français du Mexique

13 HÉGRON B., Las relaciones entre Francia y México (1934-1939),op. cit., p. 390.

14 CHARLE C., La République des universitaires : 1870-1940, Paris, Seuil, 1994, p. 359-360.

15 LAURIÈRE C., Paul Rivet le savant et le politique, Paris, Publications Scientifiques du Museum nationale d'histoir

16 GALEANA P. (coord.), Cancilleres de México. Tomo II, 1910-1988, Mexico, Secretaría de Relaciones Exteriores, 2009, p. 424-

17 ADMAE (Archives diplomatiques du ministère des Affaires étrangères), 22CPCOM/27, DUSSOL H. au SOFE, Annexe de la

18 GARCIA ROBLES A., La question du pétrole au Mexique et le Droit international, Paris, Les Éditions Internationales, 1939.

19 MURO MENDEZ J., « Le Mexique et la Réforme agraire », Le Peuple, 12 novembre 1938, p. 4 ; FROLA F., « Le Mexique est en marche », Le

20 PI-SUÑER A., RIGUZZI P., RUANO L., Historia de las relaciones internacionales de México, 1821-2010 Volumen 5, Euro

21 CHAUBET F., La politique …,op. cit., p. 94.

22 « Le Banquet Abrami », Journal Français du Mexique (JFM), le 15 avril 1937, p. 1.

23 « La Mission du Professeur Siegfried », JFM, le 12 septembre 1935, p. 1.

24 « Le banquet Siegfried », JFM, le 1er octobre 1935, p. 6.

25 CHARLE C., La République …, op. cit., p. 348 ; MATTHIEU G., Une ambition sud-américaine : Politique culturelle

26 D'HARCOURT R., « L'école française de México », Journal de la Société des Américanistes, vol. 23, n° 1, 1931,

27 ADMAE, 417QO/434, « Procès-verbal de la réunion du "Comité pour les Relations Intellectuelles

28 HÉGRON B., « Luis Chico Goerne, un académico en París al servicio de la diplomacia cultural mexicana », Revista de

29 TREBITSCH M., « Les réseaux scientifiques: Henri Laugier en politique avant la Seconde guerre mondiale (1918-1939) », dans CRE

30 Les données proviennent de l’étude de la presse française et des annonces de conférences.

31 Trente Français ont réalisé des conférences. Les journalistes René Marchand et Titaÿna en ont effectué cinq et trois

32 « Musée du Soir », Le Libertaire, p. 4.

33 RICARD R., La « Conquête spirituelle » du Mexique. Essai sur l’apostolat et les méthodes missionnaires des Ordres mendiants

34 SOUSTELLE J., Mexique, terre indienne, Paris, Grasset, 1936.

35 CADN, 432PO/C/26, GOIRAN H. au SOFE, Dépêche 82, « A.s de l'ouvrage de M. Jacques SOUSTELLE intitulé: "Mexique,

36 RIVET P. « Préface », dans SOUSTELLE J., Mexique, Terre indienne, Paris, Grasset, 1936, p. 5.

37 AHSRE (Archives Historiques du Secrétariat des Relations Extérieures), LMF (Légation du Mexique en France)

38 AHSRE, LMF, 291, lettre personnelle 583 de Marte R. Gómez à Emilio Portes Gil, le 27 mars 1935, p. 2.

39 AHSRE, LMF, 355, lettre de Narciso Bassols à Jacques Soustelle, le 20 février 1939, p. 2.

40 AHSRE, LMF, 291, GÓMEZ M. R. à PORTES GIL E., Acte 487 « Manifestaciones culturales relativas a México », le

41 LAURIÈRE C., Paul Rivet…, op. cit., p. 487.

42 ROLLAND D., « Jacques Soustelle, de l’ethnologie à la politique », Revue d’Histoire Moderne et Contemporaine, n° 43-1, janv.-ma

43 ORY P., La belle illusion. Culture et politique sous le signe du Front Populaire (1935-1938), Paris, CNRS Édition,

44 SOUSTELLE J., « Musées vivants. Pour une culture populaire », Vendredi, 26 juin 1936, p. 1 et p. 7.

45 « Conférences au Musée de l'Homme », L'Humanité, le 06 février 1939, p. 7.

46 ORY P., La belle illusion…, op.cit., p. 962.

47 « Musée du Soir », Le Libertaire, p. 4, et « LE GÉNÉRAL RUIZ ministre du Mexique aux "Amis du Populaire" », Le

48 « Au Club hispaniste », L’Ère Nouvelle, le 22 janvier 1938, p. 2.

49 « Le Camarade TOLEDANO fait un exposé de la situation mexicaine », L’Humanité, le 15 juin 1938, p. 2.

50 C’est le cas du CVIA qui écrit une lettre de soutien à Cárdenas pour la nationalisation du pétrole, AHSRE,

51 « Une Conférence sur le Mexique », La Croix, le 27 mars 1935, p. 3.

52 Sa thèse a été mentionnée dans la partie antérieure.

53 « Comité d'études d'histoire mexicaine », La Croix, le 14 novembre 1937, p. 3.

54 GUIRAUD J., « L’exploitation par la Maçonnerie du fait de l’enfance malheureuse », La Croix, le 31 mars 1936, p. 2.

55 AN (Archives nationales), lettre de Jean Champenois à Camille Lemercier, le 17 septembre 1935, p. 2.

56 ADMAE, lettre d’André Siegfried à Jean Marx, le 30 septembre 1935, p. 1.

57 SIEGFRIED A., États-Unis Canada Mexique Lettres de voyages écrits au Petit Havre Juin-Décembre 1935, Le Havre, Imprimerie du

58 CADN, 432PO/C/22, PÉRIER J. au SOFE, Dépêche 14 « A.s. de la mission à Mexico en 1927 de M. Germain Martin 

59 DARD O., « Louis Germain-Martin (1872-1948), de la nébuleuse réformatrice au CPAS », dans DARD O., RICHARD G. (dir.). Les per

60 Louis Germain-Martin, cité dans « Toute richesse vient du travail », L’Ère Nouvelle, 15 mars 1938, p. 2

61 SOUSTELLE J., « Les derniers descendants des Mayas », Regards, le 8 septembre 1935, p. 8-9, le 12 septembre 1935, p. 10-11 et le 19 

62 SOUSTELLE J., « Inquiétudes mexicaines », Regards, 23 janvier 1936, p. 6-7, « Comment le Front Populaire a terrassé le fascisme », Re

63 BORNE D., DUBIEF, H., Nouvelle Histoire de la France Contemporaine, Tome 13, La crise des années 30 (1929-193

64 Calles, président entre 1924 et 1928, avait conservé, comme Jefe Máximo de la Revolución, le contrôle politiq

65 SOUSTELLE J., « Comment le Front Populaire a terrassé le fascisme », Regards, 06 février 1936, p. 13.

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Journaux et revues

Bibliothèque nationale de France (Gallica.bnf.fr et Retronews.fr). Les journaux suivant non cités ont servi pour les statistiques sur les conférences.

Ce Soir

L'Action Française

L’Ère Nouvelle

L'Homme Libre

L'Humanité

L'Œuvre

La Croix

La Dépêche de Toulouse

Le Figaro

Le Jour

Le Journal

Le Journal des Débats

Le Libertaire

Le Matin

Le Petit Journal

Le Peuple

Le Populaire

Le Temps

Paris-Midi

Paris-Soir

Regards

Vendredi

Fond Lartilleux, Mexico

Journal Français du Mexique (JFM)

Persée.fr

Journal de la société des Américanistes

Archives

ADMAE : Archives diplomatiques du ministère des Affaires étrangères, La Courneuve

AHSRE : Archives diplomatiques du secrétariat des relations extérieures, Mexico

AN : Archives nationales, site de Pierrefitte sur Seine

CADN : Centre des archives diplomatiques de Nantes, Nantes

Notes

1 NYE J. S., « Soft Power », Foreign Policy, n° 80, 1990, p. 167.

2 FRANK R., « Culture et relations internationales : les diplomaties culturelles », dans FRANK R. (coord.), Pour l'histoire des Relations internationales, Paris, PUF, 2012, p. 375-376.

3 CHAUBET F., MARTIN L., Histoire des Relations culturelles dans le Monde contemporain, Paris, Armand Colin, 2011, p. 84-85.

4 TRONCHET G., Savoirs en diplomatie : une histoire sociale et transnationale de la politique universitaire internationale de la France (années 1870 - années 1930), Thèse de doctorat, Paris 1, 2014, p. 35-36.

5 C’est l’objet de la seconde partie de son étude. ROLLAND D., La Crise du modèle français : Marianne et l'Amérique latine, Paris, L'Harmattan, 2011, p. 108.

6 OJEDA REVAH M., México y la guerra civil española, Madrid, Turner, 2004, p. 216-218 ; DUROSELLE J.-B., La Décadence, 1932-1939, Paris, Imprimerie Nationale, 1985, p. 301-303.

7 AVELLA ALAMINOS I., De Oportunidades y retos. Los engranajes del Comercio Exterior de México 1920-1950. Thèse en histoire, Colegio de México, 2000, p. 438 et p. 432.

8 HÉGRON B., « La expropiación petrolera mexicana de 1938 y Francia: repercusiones, negociaciones y diplomacia pública mexicana », Estudios Modernos y Contemporáneos de México, n° 60, juillet-décembre 2020, p. 241-242.

9 FOULARD C., Les congrégations enseignantes françaises au Mexique (1840-1940), politiques religieuses, politiques de laïcisation et enjeux internationaux, Thèse en histoire, Université Paris I Panthéon-Sorbonne, 2009, p. 373.

10 CHAUBET F., La politique culturelle française et la diplomatique de la langue, Paris, L'Harmattan, 2006, p. 246-247.

11 HÉGRON B., Las relaciones entre Francia y México (1934-1939), Thèse de doctorat, Universidad Nacional Autónoma de México, 2020, p. 231 et p. 237.

12 Les archives diplomatiques françaises et mexicaines et de la presse française et le Journal Français du Mexique (JFM) ont permis de définir ces informations.

13 HÉGRON B., Las relaciones entre Francia y México (1934-1939),op. cit., p. 390.

14 CHARLE C., La République des universitaires : 1870-1940, Paris, Seuil, 1994, p. 359-360.

15 LAURIÈRE C., Paul Rivet le savant et le politique, Paris, Publications Scientifiques du Museum nationale d'histoire naturelle, 2008, p. 286.

16 GALEANA P. (coord.), Cancilleres de México. Tomo II, 1910-1988, Mexico, Secretaría de Relaciones Exteriores, 2009, p. 424-425.

17 ADMAE (Archives diplomatiques du ministère des Affaires étrangères), 22CPCOM/27, DUSSOL H. au SOFE, Annexe de la Dépêche 78 « A/s. Réponse à un questionnaire sur la Conférence française à l'Etranger », le 16 juin 1933, p. 2, et CADN (Centre des archives diplomatiques de Nantes), 432PO/C/27, GOIRAN H. à Sous-Direction Amérique Annexe « Note sur les moyens propres à développer l'influence française en Amérique Latine » de la Dépêche143 « Transmission d'un rapport sur l'influence française en Amérique Latine », le 22 octobre 1938, p. 15.

18 GARCIA ROBLES A., La question du pétrole au Mexique et le Droit international, Paris, Les Éditions Internationales, 1939.

19 MURO MENDEZ J., « Le Mexique et la Réforme agraire », Le Peuple, 12 novembre 1938, p. 4 ; FROLA F., « Le Mexique est en marche », Le Peuple, 15 octobre 1938, p. 4.

20 PI-SUÑER A., RIGUZZI P., RUANO L., Historia de las relaciones internacionales de México, 1821-2010 Volumen 5, Europa, México, Secretaría de Relaciones Exteriores, Dirección General del Acervo Histórico Diplomático, 2011, p. 316-317.

21 CHAUBET F., La politique …,op. cit., p. 94.

22 « Le Banquet Abrami », Journal Français du Mexique (JFM), le 15 avril 1937, p. 1.

23 « La Mission du Professeur Siegfried », JFM, le 12 septembre 1935, p. 1.

24 « Le banquet Siegfried », JFM, le 1er octobre 1935, p. 6.

25 CHARLE C., La République…, op. cit., p. 348 ; MATTHIEU G., Une ambition sud-américaine : Politique culturelle de la France (1914-1940), Paris, L'Harmattan, 1991, p. 49-51.

26 D'HARCOURT R., « L'école française de México », Journal de la Société des Américanistes, vol. 23, n° 1, 1931, p. 269-270.

27 ADMAE, 417QO/434, « Procès-verbal de la réunion du "Comité pour les Relations Intellectuelles Franco-Mexicaines" », le 08 novembre 1937. Ce n’est cependant pas le seul universitaire à y participer.

28 HÉGRON B., « Luis Chico Goerne, un académico en París al servicio de la diplomacia cultural mexicana », Revista de Historia de América, n° 156, janv. 2019, p. 274.

29 TREBITSCH M., « Les réseaux scientifiques: Henri Laugier en politique avant la Seconde guerre mondiale (1918-1939) », dans CREMIEUX-BRILHAC J.-L., PICARD J.-F. (dirs.), Henri Laugier en son siècle, Paris, « Cahiers pour l'histoire de la recherche », CNRS Éditions, 1995, p. 41-42.

30 Les données proviennent de l’étude de la presse française et des annonces de conférences.

31 Trente Français ont réalisé des conférences. Les journalistes René Marchand et Titaÿna en ont effectué cinq et trois respectivement, le reste se sont limité à une ou deux.

32 « Musée du Soir », Le Libertaire, p. 4.

33 RICARD R., La « Conquête spirituelle » du Mexique. Essai sur l’apostolat et les méthodes missionnaires des Ordres mendiants en Nouvelle-Espagne de 1523-24 à 1572, Paris, Institut d’Ethnologie, 1933 ; SOUSTELLE J., La Famille Otomi-Pame au Mexique Central, Paris, Institut d’Ethnologie, 1937.

34 SOUSTELLE J., Mexique, terre indienne, Paris, Grasset, 1936.

35 CADN, 432PO/C/26, GOIRAN H. au SOFE, Dépêche 82, « A.s de l'ouvrage de M. Jacques SOUSTELLE intitulé: "Mexique, TERRE INDIENNE" », le 28 septembre 1936, p. 2.

36 RIVET P. « Préface », dans SOUSTELLE J., Mexique, Terre indienne, Paris, Grasset, 1936, p. 5.

37 AHSRE (Archives Historiques du Secrétariat des Relations Extérieures), LMF (Légation du Mexique en France), 291, GÓMEZ M. R. à PORTES GIL E. (Secrétaire aux Relations Extérieures), Acte 487 « Manifestaciones culturales relativas a México », le 21 mars 1935, p. 1.

38 AHSRE, LMF, 291, lettre personnelle 583 de Marte R. Gómez à Emilio Portes Gil, le 27 mars 1935, p. 2.

39 AHSRE, LMF, 355, lettre de Narciso Bassols à Jacques Soustelle, le 20 février 1939, p. 2.

40 AHSRE, LMF, 291, GÓMEZ M. R. à PORTES GIL E., Acte 487 « Manifestaciones culturales relativas a México », le 21 mars 1935, p. 4.

41 LAURIÈRE C., Paul Rivet…, op. cit., p. 487.

42 ROLLAND D., « Jacques Soustelle, de l’ethnologie à la politique », Revue d’Histoire Moderne et Contemporaine, n° 43-1, janv.-mars 1996, p. 137-138.

43 ORY P., La belle illusion. Culture et politique sous le signe du Front Populaire (1935-1938), Paris, CNRS Édition, 2016, p. 263-264.

44 SOUSTELLE J., « Musées vivants. Pour une culture populaire », Vendredi, 26 juin 1936, p. 1 et p. 7.

45 « Conférences au Musée de l'Homme », L'Humanité, le 06 février 1939, p. 7.

46 ORY P., La belle illusion…, op.cit., p. 962.

47 « Musée du Soir », Le Libertaire, p. 4, et « LE GÉNÉRAL RUIZ ministre du Mexique aux "Amis du Populaire" », Le Populaire, le 14 février 1938, p. 8.

48 « Au Club hispaniste », L’Ère Nouvelle, le 22 janvier 1938, p. 2.

49 « Le Camarade TOLEDANO fait un exposé de la situation mexicaine », L’Humanité, le 15 juin 1938, p. 2.

50 C’est le cas du CVIA qui écrit une lettre de soutien à Cárdenas pour la nationalisation du pétrole, AHSRE, LMF, 317, lettre de Dodinet au Consul Général du Mexique, le 30 mars 1938.

51 « Une Conférence sur le Mexique », La Croix, le 27 mars 1935, p. 3.

52 Sa thèse a été mentionnée dans la partie antérieure.

53 « Comité d'études d'histoire mexicaine », La Croix, le 14 novembre 1937, p. 3.

54 GUIRAUD J., « L’exploitation par la Maçonnerie du fait de l’enfance malheureuse », La Croix, le 31 mars 1936, p. 2.

55 AN (Archives nationales), lettre de Jean Champenois à Camille Lemercier, le 17 septembre 1935, p. 2.

56 ADMAE, lettre d’André Siegfried à Jean Marx, le 30 septembre 1935, p. 1.

57 SIEGFRIED A., États-Unis Canada Mexique Lettres de voyages écrits au Petit Havre Juin-Décembre 1935, Le Havre, Imprimerie du Journal Le Petit Havre, 1936, p. 44.

58 CADN, 432PO/C/22, PÉRIER J. au SOFE, Dépêche 14 « A.s. de la mission à Mexico en 1927 de M. Germain Martin », le 19 mars 1928.

59 DARD O., « Louis Germain-Martin (1872-1948), de la nébuleuse réformatrice au CPAS », dans DARD O., RICHARD G. (dir.). Les permanents patronaux: éléments pour l'histoire de l'organisation du patronat en France dans la première moitié du XXe siècle, Metz, Centre de recherche histoire et civilisation de l'Université de Metz, 2005, p. 109-124.

60 Louis Germain-Martin, cité dans « Toute richesse vient du travail », L’Ère Nouvelle, 15 mars 1938, p. 2

61 SOUSTELLE J., « Les derniers descendants des Mayas », Regards, le 8 septembre 1935, p. 8-9, le 12 septembre 1935, p. 10-11 et le 19 septembre 1935, p. 12-13.

62 SOUSTELLE J., « Inquiétudes mexicaines », Regards, 23 janvier 1936, p. 6-7, « Comment le Front Populaire a terrassé le fascisme », Regards, 06 février 1936, p. 12-13, et « Le Front Populaire dans la lutte », Regards, 13 février 1936, p. 6.

63 BORNE D., DUBIEF, H., Nouvelle Histoire de la France Contemporaine, Tome 13, La crise des années 30 (1929-1938), Paris, Points, 1989, p. 130-131.

64 Calles, président entre 1924 et 1928, avait conservé, comme Jefe Máximo de la Revolución, le contrôle politique du pays. En 1935, Cárdenas, soutenu par les ouvriers et les paysans ainsi qu’à une partie du Parti National Révolutionnaire, réussit à marginaliser Calles et l’oblige à se retirer. GONZÁLEZ Y GONZÁLEZ L., Historia de la Revolución Mexicana, Tomo 15, 1934-1940: los días del presidente Cárdenas, México, El Colegio de México, 1981, p. 44-45.

65 SOUSTELLE J., « Comment le Front Populaire a terrassé le fascisme », Regards, 06 février 1936, p. 13.

References

Electronic reference

Bastien Hégron, « Savoirs et propagandes : les chercheurs au service des diplomaties française et mexicaine dans les années trente », PasserelleSHS [Online], 1 | 2024, Online since 08 January 2024, connection on 23 November 2024. URL : https://ouest-edel.univ-nantes.fr/passerelleshs/index.php?id=255

Author

Bastien Hégron

Membre du groupe « México Francia: presencia, influencia, sensibilidad », Instituto de ciencias sociales y humanidades, Benemérita universidad autónoma de Puebla

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